Une danseuse nue de Chez Parée

Danseuse de striptease sur une barre de danse poteau (pole dancing)
PHOTO:  Exey Panteleev / CC  BY 2.0

Il y a quelque temps, j'ai fait la connaissance de Sandra, une danseuse du célèbre club montréalais de striptease Chez Parée. Voici l'intégrale de l'entrevue étonnante qu'elle m'a accordée.


C'est en plein milieu de la nuit, dans l'atmosphère bruyante et colorée du resto La Banquise, un lieu de rendez-vous after hours de la jeunesse estudiantine montréalaise, que nous nous sommes rencontrés.

Notre entretien a duré deux heures, deux heures passionnantes et j'ai interrogé Sandra sur tout: son passé, son travail, ses rêves. En incluant des questions indiscrètes sur l'argent, le sexe et la drogue. La jolie stripteaseuse m'a répondu avec brio sans se défiler.



Dessin en noir et blanc représentant une conversation entre un homme et une femme.
IMAGE: Clker-Free-Vector-Images / CC0 1.0



Bonjour Sandra! Enfin il faut dire bonjour ou bonsoir quand il est 4.00 du matin?

(rires) Bah, je crois que l'un ou l'autre feront l'affaire!

Alors bonjour! Tu viens de me dire que tu travailles comme danseuse au club de striptease Chez Parée à Montréal?

Oui, en effet.

Et tu acceptes de répondre à mes questions pour mon blogue?

Oui. A la condition que tu publies mes réponses dans six mois seulement!

Juré. Promis. Craché. (rires)

Tu es certainement l'une des plus belles femmes que j'ai eu le plaisir de rencontrer dans ma vie.

(en souriant) Merci!

Mais j'imagine que tu te le fais dire cent fois par semaine et que cela produit autant d'effet chez toi que la pluie sur le dos d'un canard?

(en riant) Ecoute Mario... Si je disais que les commentaires favorables sur mon apparence physique m'étonnent, je ne dirais pas la vérité. Mais si je disais que cela me laisse indifférente, ce ne serait pas exact non plus. Cela fait toujours plaisir à entendre. Comme beaucoup de danseuses, j'ai un grand besoin d'attention et de compliments...

Intéressant! Mais si tu le veux bien, nous reviendrons plus tard sur la psychologie des danseuses.

D'accord.



IMAGE: OpenClipart-Vectors / CC0 1.0



Tu as quel âge Sandra?

24 ans.

Tu viens de Montréal?

Non, d'Ottawa. Je suis née à Ottawa, j'y ai vécu toute mon enfance de même que mon adolescence. Je réside à Montréal depuis deux ans seulement.

Peux-tu nous parler un peu de toi? de ton passé? de tes parents?

Je viens d'une famille de la classe moyenne. Ma mère est infirmière, mon père était ambulancier. J'ai un baccalauréat en traduction de l'Université d'Ottawa et j'ai suivi quelques cours comme étudiante libre en philosophie et en histoire de l'art.

Je parle trois langues: français, anglais et espagnol et j'ai fait des petits boulots comme caissière, vendeuse, etc. J'ai travaillé un peu aussi dans une boîte de traduction mais je n'ai pas aimé cela. C'était un travail fastidieux, mal payé et le patron me harcelait de ses avances.

Depuis combien de temps travailles-tu comme danseuse?

Deux ans.

Ah depuis que tu es à Montréal.

Oui, c'est cela.

Pour toi ce boulot... c'est une corvée plus ou moins agréable, ou bien une occupation que tu aimes vraiment?

(avec énergie) J'aime beaucoup! Je ne travaillerais pas depuis deux ans dans ce domaine si je n'aimais pas cela. Le masochisme... très peu pour moi!

Est-ce plus facile pour toi de danser à Montréal que cela l'aurait été à Ottawa?

Oui, bien sûr. Toute ma famille habite la région d'Ottawa et tous mes amis d'enfance également. Je me sens plus à l'aise de faire cela ici où je connais moins de gens.

Mais est-ce que ta famille sait que tu travailles comme stripteaseuse?

Non, absolument pas. Ils ne l'accepteraient pas. Personne ne le sait.



Entrée du club de striptease Chez Parée sur la rue Stanley à Montréal
PHOTO: Mario



Tu viens de me dire que tu danses dans les clubs depuis deux ans mais depuis combien de temps Chez Parée?

Un an et demi. J'ai essayé quelques mois à d'autres endroits...

Lesquels?

J'ai dansé au...

On m'avait dit que c'étaient les meilleurs clubs à Montréal. Alors j'ai voulu les essayer tous pour pouvoir faire mon choix de manière éclairée.

Et tu as choisi Chez Parée.

Oui

Pourquoi?

Tout simplement parce que c'est le top club à Montréal. C'est le club le plus classy, le club où les filles sont les plus belles, le club où une danseuse va faire le plus d'argent. Je me sens bien ici, je me sens respectée. Je ne travaillerais nulle part ailleurs maintenant que j'ai connu Chez Parée.

Réellement? Tu dirais qu'il y a une différence entre Chez Parée et les autres clubs réputés où tu as travaillé?

Oui! Le cabaret Chez Parée de Montréal possède toute une histoire, toute une légende... A l'origine, ce nom Chez Parée était celui d'un célèbre nightclub de Chicago à l'époque d'Al Capone.

Ce nom a été repris par un établissement de la métropole et dans les années 40 et 50, au moment de l'âge d'or des cabarets à Montréal, Chez Parée présentait de grandes vedettes américaines telles que:
  • Frank Sinatra,
  • Charlie Parker,
  • Dick Garcia,
  • Chuck Wayne,
  • Brew Moore
  • et la bande du Rat Pack!

C'est vrai?

Oui tout à fait! Dans les années 60 le club a changé de nom et s'est métamorphosé en club de striptease.

Dans les années 80,  sous une nouvelle administration, Chez Parée a repris son nom originel et s'est donné comme objectif de devenir le meilleur cabaret de sa catégorie au Québec. Quand les pilotes de Formule Un ou les joueurs de hockey en séjour à Montréal vont dans un club de danseuses... c'est Chez Parée!

Qu'est-ce qui t'a poussée à prendre la décision de devenir danseuse?

Sur un plan personnel, mon père est décédé il y a deux ans et j'avais envie de recommencer ma vie ailleurs. Alors je suis venue à Montréal... et puis...

Mais quelles étaient tes motivations pour devenir danseuse?

Trois choses:
  1. Tout d'abord, je vais être franche avec toi, c'est l'argent. Le désir de gagner beaucoup d'argent. C'était ma motivation numéro un
  2. Ensuite un désir d'exhibitionnisme, de monter sur scène, le plaisir merveilleux de capter l'attention de centaines d'hommes chaque soir. Beaucoup de filles rêvent de devenir stars à Hollywood. Peu y parviendront mais pour une femme jeune et séduisante, devenir « vedette » d'un club de striptease, c'est un rêve qui peut se réaliser.
  3. Et finalement, ma motivation numéro trois, c'est la musique. L'amour de la musique et de la danse.


Oui, oui je comprends.

Pour la plupart des femmes, c'est important d'être regardée, désirée, complimentée, etc. Danser nue me permet de satisfaire ce besoin.

As-tu déjà suivi des cours de danse? Est-ce un prérequis pour faire ce travail?

J'ai fait du ballet classique pendant dix ans et je m'entraîne trois fois par semaine dans un centre de conditionnement physique. Il est certain que cela aide mais ce n'est pas indispensable.






Tu parles de l'argent comme étant une de tes motivations majeures. Combien peut gagner une danseuse érotique?

C'est variable. Cela dépend du club et cela dépend de la fille. Dans les clubs bas de gamme, une fille pas trop avantagée par la nature ne gagnera guère plus que le salaire minimum. En revanche, dans un club haut de gamme, une jolie danseuse peut gagner des montants intéressants...

J'imagine que cela est ton cas. Serait-ce indiscret de te demander combien tu gagnes?

(en riant) Entre $500 et $1000 par soir.

Wow!

Oui c'est bien.

Et je parierais que les impôts ne te ruinent pas...

(en riant) Je ne te contredirai pas. Mais si tu le veux bien, on peut continuer à parler d'argent, mais ne parlons plus de l'impôt... C'est un sujet bien ennuyeux! (rires)

D'accord. Comment fonctionne la rémunération d'une danseuse? Un salaire fixe en plus des danses privées?

Non, aucun salaire. Zéro salaire. En fait une danseuse doit même payer pour avoir le droit de travailler. Il faut payer $15 par quart de travail plus $5 pour chaque demie-heure de retard. Si on fait deux quarts de travail successifs, il faut payer $10 pour le second quart. Le seul et unique revenu d'une danseuse ce sont les danses privées.

Et combien coûte une danse privée?

Une danse...
  • aux tables: $10.
  • contact (dans une loge individuelle): $15.
  • sur lit érotique: $20.

Ce sont les seules sources de revenus pour une danseuse.

Quelles sont les différences entre ces trois danses?

  • Une danse aux tables se fait en public dans la salle principale et le client n'a pas le droit de toucher la danseuse. 
  • Une danse-contact se fait en privé dans une loge confortable, la danseuse garde son slip et le client peut caresser la danseuse.
  •  Pour une danse sur lit érotique, la danseuse se dénude complètement mais le client n'est pas autorisé à la toucher.
 De nos jours les danses-contact sont les plus populaires. Je dirais qu'elles constituent 95% des danses effectuées dans les clubs de striptease du Canada.


Eh bien, parlons des danses-contact... tu dis que le client peut caresser la danseuse?

Oui, la danseuse va enlever son soutien-gorge mais garder son slip. Le client est autorisé à caresser les jambes, les fesses et les seins de la danseuse. En revanche, il est interdit de caresser les parties génitales de la fille. D'autre part, le client doit se servir exclusivement de ses mains et n'est pas autorisé à se servir de sa bouche.

Y a-il  parfois quelque chose de plus sexuel? Fellation? Masturbation?

(sur un ton ferme et catégorique) Non, non et non. La danse-contact, c'est sensuel et esthétique plus que sexuel. La danseuse fait seulement parler au client, danser devant lui et se laisser caresser dans les limites du règlement. Rien d'autre. Une danseuse se ferait renvoyer si elle était surprise Chez Parée à faire autre chose.

Je comprends. Tu m'as dit que ton prénom était Sandra. J'imagine que c'est ton nom de danseuse?

(en riant) Oui. Tu devines correctement! La majorité des danseuses choisissent un nom d'artiste plutôt que leur véritable prénom parce que:
  • certains noms se prononcent mal en anglais,
  • d'autres ne sont pas très sexy, Martine ou Nicole, par exemple,
  • choisir un autre nom permet de mieux s'évader dans un personnage imaginaire,
  • et finalement, pour diminuer le risque que des clients trop envahissants nous identifient et nous harcèlent.

Cela t'est déjà arrivé?

Moi, non. Mais cela est déjà arrivé à certaines de mes camarades.



PHOTO: Fabio Bruna / CC BY 2.0



Quel est l'âge des danseuses Chez Parée?

Le même que dans les autres clubs de qualité à Montréal soit de 18 à 30 ans! L'âge légal minimum pour danser nue au Québec est de 18 ans. Et à 30 ans, une danseuse est considérée comme « vieille ».

Donc Chez Parée toutes les filles ont entre 18 et 30 ans. Certaines stripteaseuses continuent toutefois à danser jusqu'à 37-38 ans dans d'autres clubs moins cotés, dans les régions éloignées en particulier.

Combien de jours par semaine travailles-tu?

Cinq jours.

La fin de semaine?

Il y a plus de clients la fin de semaine, c'est donc plus payant. Mais nous sommes obligées de travailler aussi en début de semaine un jour ou deux.


Si tu devais décrire le travail d'une danseuse érotique...

Je dirais qu'il y a trois volets:
  1. Un volet en tant qu'HÔTESSE. La danseuse va sourire aux clients et aller leur parler.
  2. Un volet en tant que SHOWGIRL La danseuse doit faire un certain nombre de danses sur la scène principale (sur le stage) et certaines de ces danses devront être dénudées.
  3. Un volet de DANSE PRIVÉE. La danseuse va danser en privé et converser avec un client. Comme je te l'ai dit tantôt, c'est ce troisième volet qui va lui rapporter de l'argent.

 On pourrait dire que les volets un et deux permettent à la danseuse de faire sa promotion pour obtenir des danses privées.

Qui choisit la musique sur laquelle tu danses sur le stage? Toi ou le DJ?

Moi. La seule règle c'est qu'il est interdit de choisir du rap ou du hip hop car le club ne veut pas attirer les gangs de rue.

Est-ce que tu t'entends bien avec les autres stripteaseuses?

Généralement, oui. Certaines sont devenues des amies. Mais c'est un milieu compétitif, très compétitif même.


PHOTO:   nicubunu / CC0 1.0



Quels conseils donnes-tu à une fille qui veut devenir danseuse?

Je lui suggère...
  1. de visiter plusieurs clubs comme cliente,
  2. de suivre des cours de danse poteau (pole dancing) si elle en ressent le besoin,
  3. d'essayer,
  4. d'arrêter si elle n'aime pas cela.


Puis-je te demander si tu as un chum? Et si oui, quelle est son attitude face à ton travail?

Non, depuis deux ans, je n'ai pas de chum! Tu connais le dicton: « mieux vaut être seule que mal accompagnée »? Mais je ne suis pas vraiment seule car je partage un condo avec une camarade de travail qui est devenue ma meilleure amie.

Je dois dire que près de 50% des danseuses érotiques n'ont pas de chum régulier. Selon moi, ce travail n'est pas compatible avec une relation amoureuse stable. Les hommes deviennent invariablement jaloux et veulent que la danseuse arrête de travailler. À mon avis, il faut choisir: un chum ou bien danser! J'ai choisi de danser!

Les femmes n'aiment pas non plus que l'homme de leur vie fréquente les clubs de danseuses...

Compréhensible. Jalousie sexuelle typique en effet. Mais que ces dames se rassurent... 80% des clients des bars de danseuses se contentent de regarder le spectacle et ne font JAMAIS danser de filles en privé. Et pour le 20% qui les font danser en privé... eh bien il est rare qu'une danseuse va sortir avec un client, sauf s'il est millionnaire ou encore le sosie de Tom Cruise!

Qu'est-ce qui est le plus difficile dans ce travail?

La douleur physique. Il faut marcher sur des talons hauts comme des échasses. Les danses sur le stage sont exigeantes aussi. Le résultat c'est que j'ai fréquemment mal au dos.

Et qu'est ce qui est le plus agréable?

Les rencontres. Je rencontre parfois des hommes passionnants, des hommes qui occupent des postes élevés. Ou encore plus simplement des hommes originaux, intelligents et cultivés. Converser avec eux est un réel plaisir. J'apprends beaucoup à leur contact.

Mais j'imagine que tes clients ne sont pas tous des VIP ou tous de brillants causeurs?

Non, bien sûr. Mais la majorité sont polis, gentils et j'ai du plaisir à danser pour eux. Plusieurs se confient à moi et c'est intéressant d'entrer dans leur intimité. J'essaie de les aider, de les encourager.

Il doit y avoir des clients désagréables aussi...

Oui, mais ils ne sont pas très nombreux, un sur cent peut-être. A ce moment-là, je me lève et je dis sur un ton sec: « Merci, bonsoir » puis je m'en vais! Je ne me complique pas la vie plus que cela!  Les clients me choisissent, mais je les choisis moi aussi. J'évite ceux qui sont ivres, malpolis, agressifs ou malpropres.

Quel type d'homme fréquente les clubs de danseuses?

(en souriant) Monsieur Tout-le-Monde. Il y a des jeunes et des vieux, des pauvres et des millionnaires, des célibataires et des personnes mariées, des gens scolarisés et d'autres qui le sont moins. Mais disons que le client typique c'est un homme de quarante ans moyennement instruit et gagnant un revenu moyen!

(en riant) Je vois...

Le seul vrai point commun de tous nos clients... c'est qu'ils sont hétérosexuels! (rires)

Et selon toi qu'est ce qui les pousse exactement à aller voir les danseuses?

  • Primo, je ne t'apprendrai rien en disant que la sexualité masculine et féminine sont différentes. La majorité des hommes sont voyeurs alors que la majorité des femmes sont exhibitionnistes. Pour un mâle non seulement c'est un plaisir de pouvoir regarder le corps d'une belle femme nue mais je pense que c'est un besoin psychologique. Aussi important que pour une femme d'être élégante et d'être admirée.
  • Secundo, dans la vie courante, un homme ordinaire se sent souvent ignoré par les femmes jeunes, belles, désirables... c'est un peu déprimant pour lui. Dans un club de danseuses, le rapport de force est inversé, c'est comme franchir un miroir magique. Le mâle se trouve entouré de belles jeunes femmes qui cherchent à capter son attention. Un nobody devient un roi et c'est valorisant pour l'ego masculin!


Mais c'est un rapport fondé sur l'argent...

Bien sûr, l'argent joue un rôle important. Mais c'est le cas de nombre de rapports humains. Si un fonctionnaire, un dentiste, ou un enseignant vous parle gentiment, c'est qu'il est payé pour le faire. Même les sentiments d'amour de vos enfants existent en partie parce que vous satisfaites leurs besoins fondamentaux d'hébergement et de nourriture.

C'est vrai.

Et puis, l'argent n'est pas tout. Dans le milieu de la danse érotique comme dans beaucoup d'autres milieux, celles qui vont réussir le mieux vont être celles qui aiment vraiment leur travail, qui aiment vraiment interagir avec les gens. Je ressens souvent des sentiments d'amitié pour mes clients, j'écoute le récit de leurs problèmes, je leur parle des miens, etc. cela crée une complicité certaine.







Que fais-tu en dehors du travail? Quels sont tes loisirs?

Je lis beaucoup. En particulier les auteurs français, britanniques et russes du XIX ème siècle: Stendhal, Châteaubriand, Maupassant, Victor Hugo, Tolstoi, Dostoievsky, Gogol, Emily Brontë, Thomas Hardy, etc... mais également des essayistes contemporains.

A l'origine, j'ai étudié la traduction car j'espérais devenir traductrice littéraire. Mais j'ai fini par comprendre qu'il n'y avait pas de travail dans ce domaine. J'aime aussi le cinéma, les sorties au resto et les promenades sur le Mont-Royal.

Certaines personnes voient les cabarets érotiques comme une incarnation du mal...

Préjugés idiots!

Comme des endroits où les femmes sont exploitées...

C'est lorsque je travaillais comme caissière, vendeuse ou traductrice-stagiaire que j'étais exploitée! Je n'ai jamais été aussi bien traitée que dans les clubs de danseuses!

J'aimerais parler des stéréotypes associés aux danseuses nues...

D'accord!

Tu es allée à l'université. Tu t'exprimes intelligemment avec une diction parfaite. Mais plusieurs supposent que les danseuses sont peu scolarisées... Certains même les soupçonnent de ne pas avoir un QI bien élevé...

(en riant) Ma collègue de travail et colocataire a une maîtrise en philosophie et un QI de 140!  Plusieurs danseuses possèdent des diplômes universitaires et sont des filles brillantes. Ceci étant dit, il y a une part de vérité dans l'affirmation selon laquelle les danseuses ne sont pas très éduquées. Avoir fréquenté l'université n'est pas un prérequis pour danser dans un bar!

30% des jeunes filles de 18 à 30 ans au Québec fréquentent ou bien ont fréquenté l'université. Bien que je n'aie pas fait une analyse scientifique de la question, j'ai souvent interrogé mes camarades sur leurs études et je dirais que 10 à 15% des danseuses sont allées à l'université. Un pourcentage moindre par conséquent que celui des Québécoises de la même tranche d'âge.

On dit que les danseuses ont connu une enfance difficile...

Ce n'est pas mon cas. Mais le pourcentage de danseuses nues ayant vécu des carences affectives est probablement plus élevé que la moyenne.  La danse devient alors une surcompensation pour le manque d'attention et d'amour.

On prétend que les danseuses prennent de la drogue...

Plusieurs danseuses, oui. Tout comme les actrices, les chanteuses ou les mannequins. Pour une fille qui prend de la drogue, danser permet de gagner assez d'argent pour financer sa consommation. C'est donc une motivation pour choisir cette carrière. Aussi l'atmosphère festive des clubs pousse certaines à vouloir s'éclater! D'autres cherchent dans les stupéfiants un remède à leur angoisse...

Personnellement, je ne fume pas, je ne bois presque pas d'alcool, et je ne prends jamais de drogue! En règle générale, je dirais que la majorité des danseuses qui fument la cigarette prennent aussi de la drogue, et que celles qui ne fument pas n'en prennent jamais. Evidemment il est interdit aux filles de consommer sur les lieux de travail car les clubs ne veulent pas de problèmes avec la police.

On prétend aussi que les danseuses ont un caractère de princesse... qu'elles sont narcissiques et capricieuses.

(en riant) J'espère que ce n'est pas mon cas! Mais oui, c'est assez vrai. Je ne sais pas si c'est parce que les « princesses » sont attirées par ce travail.  Ou bien si être entourée par une cour d'hommes qui vous désirent, vous complimentent, sont prêts à faire des efforts pour vous  finit par rendre les filles difficiles et narcissiques... les deux peut-être!






On dit que plusieurs vedettes du sport ont rencontré leur femme Chez Parée...

(en souriant) Véridique! Mais ne compte pas sur moi pour te donner des noms!

Beaucoup d'hommes rêvent de « sortir » avec une fille de club... pour dire les choses plus crûment d'avoir une relation sexuelle avec une danseuse. Cela se produit parfois?

(en riant) Question délicate... Oui cela se produit mais pas très souvent! Il y a trois cas de figure où une danseuse va accepter de sortir avec un client rencontré au club:


  1. LE CLIENT VIP. Je viens de parler des sportifs célèbres... Certaines danseuses rêvent d'épouser ou au moins devenir la petite amie officielle d'une vedette ou d'un multimillionnaire. Etant donné que les vedettes fréquentent Chez Parée, il arrive qu'une danseuse et qu'un VIP se plaisent mutuellement.
  2. LE TRÈS BEAU MÂLE. Les danseuses sont de jolies filles mais certains clients sont de très beaux gars aussi. Là encore un match peut se produire.
  3. LE CLIENT RÉGULIER SYMPATHIQUE ET GÉNÉREUX. Certains clients réguliers deviennent en quelque sorte des amis de la danseuse. Il arrive parfois que certaines acceptent d'aller prendre un verre ou d'aller dîner avec de tels clients. Comme je l'ai dit tantôt, un pourcentage élevé de danseuses n'ont pas d'amoureux stable mais elles ont des besoins sexuels comme toutes les femmes. Si le client n'est pas trop laid, s'il est gentil et généreux, la rencontre se termine parfois ailleurs qu'au bar ou au resto...


J'aimerais être indiscret et te demander si personnellement cela t'est arrivé? As-tu déjà eu des aventures avec des clients?

(en riant) Question indiscrète en effet!  Mais je vais répondre... Oui, cela m'est arrivé deux fois au cours de la dernière année. J'ai eu une amourette de quelques semaines avec un joueur de tennis de réputation mondiale et une autre avec un mannequin américain en voyage d'affaires à Montréal.

Si je ne chantais pas si faux, j'aimerais fredonner Some guys have all the luck de Rod Stewart... (rires)

(en regardant l'heure sur son cellulaire) Ecoute... Je suis fatiguée... Il est tard... Alors une dernière question et ensuite je m'en vais.

D'accord! Une dernière question... Avant que débute cette entrevue, tu m'as dit que tu allais cesser de travailler comme danseuse d'ici quelques mois. Pourtant il me semble qu'à vingt-quatre ans tu es bien jeune pour prendre ta retraite?

Je retourne à l'université à temps plein fin août. J'ai été acceptée à l'université McGill en droit et je veux devenir avocate. Alors je vais me concentrer sur mes études. Au cours des deux dernières années, j'ai gagné beaucoup d'argent et j'ai très peu dépensé. Cela va me permettre de faire ma scolarité sans m'endetter et sans stress financier.

 Pour moi, danser a été un beau défi, un défi que j'ai tentée de relever le mieux possible. Travailler Chez Parée m'a beaucoup apporté, et pas seulement sur le plan monétaire, mais je considère que cela a été une étape dans ma vie et je suis maintenant prête à passer à autre chose... Alors voilà!


Cela a été bien agréable pour moi de faire cette entrevue... Je te remercie vraiment beaucoup d'avoir répondu à toutes ces questions!

 Cela a été un plaisir partagé! Merci!

 (Sandra se lève, prend ses affaires, fait mine de vouloir régler l'addition, je lui fait signe que je vais payer, nous nous serrons la main et je la vois s'éloigner vers la sortie d'un pas gracieux.)

N.B. Au moment où j'écris ces mots, Sandra a cessé de travailler Chez Parée. Suivant la promesse que je lui ai faite, j'ai attendu six mois avant de publier son entrevue.





Pour en savoir davantage sur:


 A) le club Chez Parée


B) la danse poteau (pole dancing): cours et associations

C) le striptease: point de vue universitaire

D)  le comportement amoureux des danseuses 

G) le striptease au cinéma: 25 meilleurs films

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Citation du jour

« Une strip-teaseuse prouve que si les femmes n'ont jamais rien à se mettre, il leur faut toujours du temps pour l’enlever. »
 De Noctuel 


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6 commentaires:

  1. Wow! J'ai déjà lu des interviews avec des danseuses. Mais jamais aucune qui soit aussi complète ou aussi intéressante que celle-ci. Bravo Mario!

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  2. Salut Mario

    Moi j'ai dansé dans beaucoup de clubs à Montréal mais aussi en Ontario. Puis je suis d'accord avec la plupart des choses que Sandra dit!

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  3. Moi aussi j'ai dansé dans les clubs du Québec et de l'Ontario. J'ai dansé pendant 12 ans et j'ai aimé ça en maudit. Mais maintenant je me trouve trop vieille (j'ai 34 ans).

    En général, c'est toujours un peu fatiguant de lire des reportages sensationalistes qui montrent toujours les danseuses comme des pauvres victimes, comme des idiotes, comme des filles perdues qui sont exploitées. Je dis pas que ça existe pas pantoute mais d'après mon expérience c'est une infime minorité, certainement pas la majorité. La vérité c'est que la majorité des danseuses sont des femmes fortes, des sortes de femmes d'affaires, des femmes indépendantes.

    C'est le fun de lire une interview aussi détaillée et aussi positive avec une danseuse. Moi ce que j'aimais le plus dans les clubs, c'est pas les rencontres avec les clients (comme dans le cas de Sandra), c'est danser sur le stage, être une star!

    Merci pour cette interview Mario! Bonne chance à Sandra dans ses études!

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